Avec son univers récréatif en miroir de nos sociétés, l’artiste pluridisciplinaire à la renommée internationale fait escale à Paris.
L’histoire de CEET Fouad, né en 1971 à Oran (Algérie) de parents marocains et arrivé en France à l’âge de 7 ans, commence à l’adolescence. Dans le quartier de la Terrasse, en banlieue toulousaine, il découvre le graffiti et œuvre dans les rues de la Ville Rose jusqu’à en devenir une figure légendaire. Membre notamment d’un mythique collectif, CEET impose d’abord ses tags et ses flops à l’international… « Attiré par l’art en général – la musique, la danse… –, j’ai toujours aimé dessiner. Après une enfance chaotique scolairement, j’ai découvert le graffiti un peu par hasard, dans les années 1980-1984. À 14 ans, toucher ma première bombe a été un véritable électrochoc… ce qui m’a d’ailleurs permis de me trouver. Comme tous les graffeurs, j’ai commencé par du lettrage, en vandale dans les rues de Toulouse. Avec quelques amis, nous avons formé un collectif et avons eu la chance d’être sponsorisés par Adidas pendant 8 ans, ce qui nous a permis de faire le tour du monde ».
Métaphore de l’essaim humain
Mais c’est en Chine qu’il dessine ses premiers Chicanos. « Tout est parti d’un problème de communication. Nous étions dans un restaurant avec des amis et voulions commander à manger. Les serveurs ne comprenant ni le français, ni l’anglais, j’ai dessiné un poulet sur la nappe, ce qui a fait rire mes amis. Dès que j’en avais l’occasion, je bombais les murs de lettrages et de poulets. Puis, petit à petit, le poulet s’est davantage imposé, a pris de plus en plus d’ampleur, et j’ai commencé à le décliner à l’envi. Il m’a permis de m’épanouir, de me détacher du graffiti, même si je reste un graffiti artiste et que je continue à intervenir dans la rue, de créer mon univers. Il m’a néanmoins fallu 6 ou 7 ans pour le développer et le décliner en installation, en sculpture, en animation… ».
Interpellant avec humour le spectateur, ces poulets emblématiques, aux couleurs qui claquent magistralement – métaphore de l’essaim humain qui compose nos sociétés contemporaines –, témoignent du regard que porte l’artiste sur ce qui l’entoure. « Tous différents, tant par leur forme, leurs couleurs, que leurs postures, Les Chicanos, depuis toujours humanisés et constamment en groupe, évoquent la foule, celle accumulée dans les grandes villes, les centres commerciaux… Regarder cette foule vivre m’inspire. Par mon travail, j’en examine de façon humoristique le caractère. Parodie de nous tous en tant qu’humains, Les Chicanos me permettent de communiquer, de traduire mes ressentis et mes émotions par rapport à la société dans laquelle nous vivons ». Plus complexes et profondes qu’il n’y paraît, ces mises en scène de l’humanité, à la fois déroutantes d’absurdité et émouvantes de fragilité, aussi touchantes que risibles, sont totalement jubilatoires !
5. Manilos 2, 2023, technique mixte, 100 x 100 cm.
6. Never end city, 2024, technique mixte, 100 x 100.
Dans un esprit « rétrospective »
Nourri de voyages, de rencontres et de partages, CEET ne cesse d’enrichir son univers, transposant dans ses peintures, sculptures et autres installations une énergie créative rafraîchissante. En témoigne sa prochaine exposition, baptisée « Free Vol », dans laquelle l’artiste présentera des œuvres de différentes périodes, dans un esprit « rétrospective ». L’occasion de découvrir le parcours de CEET ainsi que l’évolution de son travail, entre abstraction, figuration et Chicanos notamment. Car pour l’artiste qui apprécie l’espace urbain, « son fourmillement, ses couleurs, ses mouvements, son éclairage, notamment la nuit, ses câbles électriques, l’architecture des bâtiments… », il était évident de retranscrire cette effervescence par l’accumulation, une palette multicolore, l’ombre et la lumière… « À Manille, j’ai d’ailleurs réalisé toute une série dans laquelle j’associe des immeubles déstructurés et Les Chicanos ». Un rendez-vous immanquable car l’artiste international n’est que de passage tant il doit répondre à de nombreux projet, une exposition muséale en Chine, une exposition à Hong Kong, une tournée d’un mois au Japon, une façade avec la mairie de Toulouse, un pont de 8 km à Manille, un septième livre, un film…
À voir
« Free Vol »
Du 18 au 30 avril 2024
114 rue de Turenne 75003 Paris
Rose Studio Art Gallery
rosestudioartgallery.com
Instagram : @rosestudioartgallery
CEET Fouad : ceetfouad.com
Instagram : @ceet_fouad