L’art novateur de Miss.Tic s’affiche Palais des Papes

Comme une ultime provocation, un dernier pied-de-nez à l’histoire et au pouvoir, Miss.Tic s’expose au Palais des Papes, lieu de la puissance politique, religieuse et militaire devenu symbole populaire de culture.

Figure incontournable du mouvement des pochoiristes français, si Miss.Tic, disparue en mai 2022, est l’une des pionnières de l’Art Urbain dans l’Hexagone, elle ne s’y est jamais limité. « Saisir dans l’éphémère / le désordre d’un graffiti / l’éternel désir d’exister », l’un des premiers aphorismes qu’elle a inscrits sur les murs de Paris au début des années 1980, est celui qui raconte le mieux son œuvre : « le désir d’exister sans cesse renouvelé, le jeu vertigineux du temps, de la trace et de l’éphémère, le questionnement permanent, sur les murs de nos villes, de notre mode d’existence. Poétesse avant tout, l’artiste a exprimé sa rage, ses désirs, son humour, son urgence d’exister à travers une pratique protéiforme, en ville puis en galerie, sur les murs, la toile, le papier, la soie, la tôle… », souligne la curatrice Camille Lévy Sarfati.

Une singularité plastique et littéraire
Traçant son sillon dans un monde d’hommes avec une singularité plastique et littéraire, Miss.Tic a bousculé le monde dans une indocilité perpétuelle. Il était tant de lui rendre hommage avec cette première monographie et exposition posthume au Palais des Papes, un lieu qui a longtemps écarté les femmes. À travers l’œuvre et les figures de Miss.Tic, elles réinvestissent ce Palais fort de sept siècles d’existence. Si la progression de l’exposition est non linéaire, elle permet aux publics de prendre connaissance du parcours de l’artiste et de l’évolution de sa pratique, en trois mouvements. Les deux premiers, chronologiques, retracent deux périodes de sa vie. 1985-2000, d’abord, période d’expérimentation, de quête de soi, de maîtrise de la rue et de l’espace urbain. La poésie, souvent seule et sans image, est au centre de sa pratique. On y trouve un propos révolté, écorché, enragé parfois, politique toujours. Ses autoportraits, premières figures représentées, portent ses blessures et marquent en rouge et noir la trace de son existence. 2000-2022, ensuite, temps d’une recherche technique et plastique approfondie, d’une exploration des matériaux et des supports, du passage de l’illégal au légal. Entre les deux, une plongée dans l’intime de la fabrication, de la recherche, de l’expérimentation de l’artiste à travers la reconstitution de son atelier et l’exposition d’un ensemble d’archives (carnets, croquis, calques, affiches, lettres, photos, vidéos et enregistrements).

Miss.Tic et Jace, Vivre, c’est de la Bombe.

Des aphorismes qui claquent
L’exposition s’attache ainsi au geste, aux ambiances, aux matériaux, et retrace l’incarnation progressive de l’artiste. D’abord silhouette insaisissable, nocturne et plaquée sur les murs, Miss.Tic prend peu à peu corps et visage dans l’exposition. Elle s’incarne progressivement au fil des salles, comme elle le fit au cours des années, aux yeux des publics. « À la Vie, à l’amor » propose, en dialogue avec le lieu, d’ouvrir un chemin non-linéaire allant du civique, du public, du politique vers l’intime et l’incarné. « Dans un saut de l’illicite vers le licite, l’artiste pose des décennies durant la question du centre – la rue, les gens, la ville comme musée à ciel ouvert – et de la marge – le « gratin » de l’art contemporain, ses galeries aux néons blancs et ses prix indécents. Artiste éminemment populaire, elle incarne une forme d’anti-snobisme parisien et a gagné, au prix de longs efforts, une place centrale au sein d’une histoire de l’art en train de s’écrire, décomplexée, inclusive et audacieuse, à laquelle cette exposition entend contribuer ». On a hâte !

À voir
« Miss.Tic – A la vie, à l’amor »

Du 27 juin 2024 au 5 janvier 2025
Du 1er mars au 3 novembre de 9h à 19h, du 4 novembre au 31 décembre de 10h à 17h
Prix : 12 € / 10 €
Palais des Papes
Place du Palais 84000 Avignon
palais-des-papes.com
Instagram : @palais_des_papes

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