A la bombe, WESL donne forme et figure à des œuvres singulières, atypiques et esthétiques, dans une démarche artistique autant explorative qu’introspective…
A voir
Galerie Barrou Planquart
Rue de Paris 95680 Montlignon
galeriebarrouplanquart.com
Instagram : @galeriebarrouplanquart
WELS : wesl-art.com
Instagram : @weslart
Issu de la génération de graffeurs des années 1990, l’artiste espagnol basé à Tolède travaille d’abord le lettrage avant de se tourner vers le figuratif après ses études à l’ESDIP (Escuela Superior de Dibujo Profesional). Ses fresques témoignent ainsi d’une volonté tenace : celle de transformer les murs gris de l’espace urbain en lui apportant couleur et harmonie. Ses recherches artistiques le conduisent également vers l’abstraction, avec un travail d’introspection, comme en écho à l’injonction faite à Socrate par l’Oracle de Delphes : « Connais-toi toi-même ». À travers ce langage visuel composé de couleurs, de dégradés, de formes ondulantes, d’effets de volume, de transparences…, WESL dévoile son voyage personnel… ouvert sur monde et les autres.
Qu’est-ce qui t’a attiré dans le graffiti ?
Tout a commencé par un voyage à Madrid avec mes parents, en 1991. J’avais 9 ans. Je me souviens clairement avoir découvert les graffitis sur les murs, les signatures et les œuvres des pionniers comme Muelle, Tifón… Ce fut un coup de foudre. Ces noms de personnes alors anonymes peints dans la rue a éveillé quelque chose en moi, quelque chose que je ne pouvais pas expliquer alors. Mais je savais une chose : je voulais faire partie de ce mouvement. Au fil du temps, j’ai cherché et observé les créations plus élaborées, que ce soit du lettrage ou des personnages, réalisées par certains crews comme TCK et DMC-ROCK, dans des villes comme Móstoles et Alcorcón. Cette expérience n’a fait que nourrir mon amour pour le graffiti, le portant toujours plus haut jusqu’à aujourd’hui.
Dans ta ville natale, Tolède, tu as décoré de nombreux magasins. Est-il important d’être proche des gens dans leur vie quotidienne ?
Définitivement oui ! Personnellement, je trouve enrichissant d’interagir avec les gens tout en réalisant une fresque dans l’espace urbain. Je crois fermement au pouvoir de l’Art pour transformer et embellir l’environnement urbain, le rendant plus vibrant et attrayant pour ceux qui y vivent. Ce type d’art nous permet d’aller au-delà des lieux conventionnels, en rapprochant l’expression créative de la vie quotidienne de chacun, quel que soit son âge, son statut social, son sexe, sa religion ou sa culture. Je suis enthousiasmé par l’idée que mon travail puisse inspirer des réflexions, des conversations, et ajouter une touche de joie et de couleur à la routine, avec un impact significatif et positif sur la communauté. En outre, j’apprécie que mon travail active chez les spectateurs un autre point de vue sur la vie, offrant une expérience qui va au-delà de l’esthétique et plonge dans l’émotionnel et le philosophique.
Comment es-tu passé des graffitis figuratifs aux formes géométriques abstraites ?
Pendant de nombreuses années, je me suis consacré exclusivement au graffiti, axé principalement sur l’écriture de mon nom. Mon parcours artistique a pris un tournant vers le figuratif après quelques mois passés dans une école de dessin, où j’ai acquis des techniques fondamentales. Cette formation m’a donné l’envie d’explorer le graffiti d’une manière plus figurative, un style que je pratique toujours et que j’apprécie énormément. Puis, dans mon studio, j’ai fait mes premiers pas avec des œuvres plus abstraites et géométriques en 2014, lorsque j’ai commencé à expérimenter de nouvelles formes d’expression. Mais c’est en 2016, lors d’une résidence artistique à Street Art City que j’ai eu l’opportunité de réaliser deux fresques murales et deux tableaux pour leur espace d’exposition. Pendant la création des toiles, j’ai ressenti le besoin d’explorer un style plus libre et abstrait, loin du figuratif. Après une profonde introspection, j’ai pu développer un langage visuel et un style qui me permettent de m’exprimer de manière plus personnelle et authentique. Un processus d’évolution constant qui a donné vie à ce que je propose désormais.
5. Inside 01 (détail), 2022, aérosol sur toile.
6. Inside 04, 2023, aérosol sur toile.
Tu as étudié l’art, mais aussi le tatouage. L’as-tu pratiqué ?
Oui, en effet, j’ai eu l’opportunité d’explorer le monde du tatouage pendant deux ans, tout en dirigeant mon propre studio et en continuant à peindre dans la rue. Cependant, avec le temps, j’ai réalisé que le tatouage ne suscitait pas en moi la même passion que la peinture. J’ai donc décidé de me consacrer à 100% à ce qui me passionnait vraiment : la peinture, que ce soit sous forme de fresques urbaines ou d’œuvres d’atelier. Cette décision m’a permis de concentrer mes efforts et mon énergie sur le développement de mon art dans sa forme la plus authentique et la plus significative pour moi.
Te définirais-tu comme artiste muraliste ?
Me définir comme muraliste impliquerait que je m’identifie exclusivement comme étant un artiste spécialisé dans la création d’art public sous forme de fresques murales, alors que j’ai un travail d’atelier… Je dois admettre que je ne suis pas tout à fait à l’aise avec les étiquettes et les définitions spécifiques. Je préfère simplement me voir comme un individu s’exprimant à travers l’Art Urbain, en particulier parce que j’utilise la bombe de peinture comme médium.
Te participes à des festivals à travers le monde. L’Art Urbain est-il international par nature ?
Oui ! Et c’est vraiment enrichissant d’avoir l’opportunité de voyager, de se confronter à différentes cultures et de rencontrer de nouvelles personnes tout en pratiquant ma passion. Ces dernières années, nous avons été témoins d’une croissance impressionnante du nombre de festivals d’Art Urbain dans pratiquement tous les coins du monde. Ce phénomène reflète l’universalité et la popularité croissante de cet art en tant que forme d’expression artistique qui transcende les barrières géographiques et culturelles.
8. Igualdad, Yeles, Espagne, 2021.
9. Ancianos, Polán, Espagne, 2021.
À travers tes fresques, souhaites-tu transmettre un message ?
Récemment, j’ai eu l’opportunité de travailler sur plusieurs projets pour des institutions, abordant des thèmes tels que le changement climatique ou l’égalité des genres, en utilisant l’art comme plateforme pour sensibiliser à des questions importantes. Cependant, je ne me considère pas nécessairement comme un muraliste avec un message défini. Au contraire, je préfère me laisser porter par le moment présent et permettre à mon art de refléter mes expériences et mes émotions. Je m’inspire de tout ce qui m’entoure, en particulier la connaissance de soi et la musique électronique. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de représenter de nombreux artistes internationaux de la scène musicale dans mon travail.
Ton travail en studio constitue-t-il une partie importante de ta pratique ?
Oui ! Le travail d’atelier est définitivement une partie fondamentale de ma pratique artistique. Lorsque je me plonge dans la création de mes œuvres de studio, c’est comme si je plongeais dans les profondeurs de mon être. C’est un processus d’exploration des couches les plus intimes, où je découvre à la fois les lumières et les ombres. Lors de ce processus, je me connecte avec l’énergie qui coule en moi et je la transmets à travers mon langage pictural, créant ainsi un témoignage visuel de mon voyage personnel. C’est un espace sacré et privé où je suis seul : il n’y a que moi et la peinture. Et dans cet espace, nous fusionnons. Cette introspection nourrit ma créativité… et c’est ainsi que j’exprime ma véritable essence.
Comment ton travail va-t-il évoluer ?
Cette année, je vais consacrer beaucoup de temps à peindre en studio, afin d’explorer de nouvelles directions. J’ai déjà plusieurs idées en tête que j’ai hâte de développer. Je souhaite également travailler de nouvelles techniques et de nouveaux formats. Mon objectif est d’élargir ma pratique artistique vers des territoires inconnus, de pousser mon art encore plus loin.
Quels sont tes projets ?
Je travaille sur les œuvres que je présenterai au mois d’avril sur Urban Art Fair, avec la galerie Barrou Planquart. Je dois également réaliser deux grandes fresques murales pour des institutions espagnoles. Enfin, pour 95 Art Gallery, galerie madrilène, je commence de nouvelles peintures pour une prochaine exposition.